Aujourd’hui :
Francorchamps, ou le piège fatal de la mort qui tue
Cher Membre-Membre-Membre-Membre
(je me rends compte soudain qu’avec le mot « membre », la tirette
fonctionne moins bien),
Aujourd’hui,
on va aller chipoter là où ça fait un peu mal.
Francorchamps !
Enfer. Francorchamps, Francorchamps. Francorchamps.
Imaginez Napoléon
à Sainte-Hélène, sur son lit d’agonie, avec un acouphène sadique qui vient lui
murmurer de façon lancinante « Grouchy, Grouchy, Grouchy … ». Le dernier soupir ressemble à un orgasme, dans
des cas pareils.
Francorchamps.
Le piège parfait. L’alternative maléfique. Quel que soit ton choix, tu es
foutu, Petit Homme, comme aurait écrit Wilhelm Reich (pas de chance, quand
même, hein, pour un progressiste, de se farcir un nom pareil !).
Tu votes
contre : tu es un intégriste malfaisant qui fait perdre de l’emploi et
n’aime pas cette bonne odeur d’huile de vidange qui extasie les vrais sportifs.
Tu votes
pour : tu n’as aucune suite dans les idées, où sont tes principes de base,
hé, tu fais de la politique comme les autres ou quoi ?
Tu
t’abstiens : eunuque politique, comme disait Louis Michel; là, tu es
vraiment mort. Ce qui est marrant, c’est que les partis traditionnels quand ils
sont dans l’opposition font souvent cela et personne ne leur en tient rigueur.
C’est bien la preuve que nous sommes un parti alternatif et différent.
Bref, Cher
Membre, Membre, Membre, Membre, on avait les noisettes bien coincées dans un
trou du tamis de la chaise en osier, et rien à faire pour s’en extirper. (Et je me rends compte que cette métaphore est
fort peu épicène, pardonnez-moi, Chère Membre) .
Mais on a
appris, on est adultes, maintenant : bien malin qui nous coincerait encore comme ça. On sait que pour chaque
situation, on doit avoir prêtes chaque réponse et son contraire. Le Grand Prix
de Francorchamps est supprimé ? Génial ! Enfin on nous donne
raison (comme la fin du monde le fera de façon éclatante quand il n’y aura plus
un seul électeur pour s’en rendre compte, mais une victoire intellectuelle,
c’est important, quand le corps a disparu…). Il est maintenu ?
Génial ! Les oiseaux vont avoir un peu de distraction, les
francorchampenois un peu de boulot pendant un WE (message à Paul Magnette pour
l’occasion : Paul, essaye de piquer le Grand prix à Francorchamps, le ring
de Charleroi, pour tourner en rond, c’est le rêve) , les amateurs de
formule 1, un peu de consolation dans un monde qui laisse si peu de place au
bruit, au cambouis et à la publicité agressive. Et six millions par an,
qu’est-ce que c’est ? A peine un bras et une épaule d’Eden Hazard (ses
jambes valent beaucoup plus, sa tête, je sais pas).
Chers
Membre (X4, ça c’est l’avantage des mots qui se mettent pas au féminin), il
vous faut tirer les leçons de cette malheureuse (mais aujourd’hui très
positive) histoire de Francorchamps. Dans votre argumentation, avant le débat
fatal sur radio Gouy-Lez-Piéton, ou même au café du coin, prévoyez toujours un
argument et son contraire.
On installe
une porcherie ? C’est une vraie tragédie pour les riverains. Mais une
bonne odeur de merde porcine, ça fait très campagnard, aussi. On pourrait
installer une chambre d’hôte pas loin.
Une grande
surface s’installe à la place d’un parc arboré?. Ca va tuer le petit commerce. Mais
quelle aubaine pour tous les chômeurs de moins de 25 ans désoeuvrés qui ne
savent pas de quoi leur repas de midi sera fait.
Une
autoroute traverse la commune ? Et va couper une piste cyclable, c’est un
scandale. Mais pour les petits hôtels de la région, c’est une aubaine. Et s’il
n’y a pas d’hôtels, c’est l’occase d’en créer.
Allez, je ne vais pas insister : vous
avez compris.
C’est ça
aussi qui fait de notre parti un parti différent : les militants
comprennent vite.
Chez les
socialistes, par exemple, il faut répéter cent fois le même discours. « Il
faut faire de la nouvelle politique, parce que l’ancienne n’a plus la
cote » ; cent fois, qu’ils le répètent, et y en a qui n’ont
toujours pas compris.