dimanche 5 juin 2016

Sunday beauty sunday

M'avoir fait découvrir le marché de Wazemmes mérite une reconnaissance éternelle jusqu'à ce que ma mort s'ensuive. 

Dimanche brouillardeux de ce côté de la frontière, voilà que le ciel s'éclaire au passage de l'ancienne douane, et que plus l'autoroute nous rapproche de ce quartier de Lille, plus la température fait ouvrir les fenêtres. Il faut se garer loin, tout sent la pisse sur les trottoirs que l'on emprunte, mais quelques odeurs de kebab tempèrent et des mendiantes vous sourient même si vous leur glissez un bonjour plutôt qu'une pièce. 

Wazemmes, c'est le marché du midi... en plus coloré, en plus foisonnant, en plus compact. Il n'y a pas que les marchands qui sont en grande majorité maghrébins, les clients aussi. A Wazemmes, on frôle, on se presse, on bouscule et on est bousculé par des dames voilées qui toujours s'excusent. Les vendeurs de chaussures s'agenouillent devant la petite fille qu'ils appellent "princesse", pour lui enfiler la sandalette magique à 10 €, en souriant parce que vous avez refusé la godasse à paillettes qu'ils proposaient pour choisir un modèle plus sobre. 

A Wazemmes, on achète complice des fruits ou des légumes qui s'encourront tout seuls si on ne les consomme pas sitôt rentrés. Des chemises dont les boutons s'envoleront à la première toux, des piles Duracell reniées par la marque et des économes à 1 € qui rendront l'âme à la première patate. 

Wazemmes, c'est les vacances et le dépaysement à 20 kilomètres, ceux qui ne prennent plus l'avion pour la bonne conscience apprécient.

Après le marché, à cent mètres, il y a un restaurant chinois extraordinaire, La villa de Tsing Tao, sans rire, le meilleur que je connaisse. Le garçon qui accueille rayonne, il est le fils du patron chinois et de sa femme française, il vous repaît des descriptions des plats qu'il déposera devant vous tantôt. 

Le métissage est source de beauté.

Son père, le cuisinier, sourit tout le temps et à la fin du repas, offre à la petite fille un stylo bille aux couleurs de sa robe. Sans doute beaucoup de cuisiniers belges dans des restaurants belges en Chine en font-ils autant. 

Pendant ce temps, sur la place, des familles Roms quémandent quelques légumes et fruits invendus. Les Roms, ce sont un peu des Cheyennes dénaturés par des siècles de regards haineux, ils communient avec les poules des sédentaires en leur tordant le cou. Ils vivent le long de l'autoroute, dans des bidonvilles hallucinants et glauques. Les jupes de leurs femmes pétillent de couleurs. 

C'est tout cela, le marché de Wazemmes.

Vendredi dernier, pendant que Goblet nous distrait, le Gouvernement belge a approuvé la proposition de Théo Francken de supprimer 10 000 places d'accueil pour des demandeurs d'asile.




     

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