samedi 30 avril 2016

Raoul casse trop


Dans mon jardin, il y a un magnolia. C'est un arbre amusant: c'est vraiment beau pendant une semaine, après, ça perd ses feuilles qui viennent pourrir sur le carré potager, il faut vite les foutre dans le compost pour que ça n'empêche pas les épinards de pousser, et après, ça a une seule et unique vertu: c'est là, ça dérange pas, et comme les feuilles sont petites, ça ne fait pas beaucoup d'ombre.

Raoul Hedebouw et le PTB, c'est un peu ça. Tiens, je me demande soudain pourquoi j'ai mis "et" plutôt qu'une virgule.

Il a des côtés sympas, Raoul. Bon client de Matin Première. Un service d'études impressionnant vu les moyens qu'on peut lui supposer. Semaine de floraison.

Mais il y a aussi ces contradictions internes qui tantôt amusent -les relents staliniens désuets- tantôt fâchent - le racolage éhonté au nom de la pureté, ou comment faire pire que ce qu'on prétend dénoncer.

Raoul dénonce l'âge et le montant de la retraite des parlementaires dans de grandes envolées qu'il aimerait à la Danton et qui sont plutôt du Robespierre. Si vous n'avez pas entendu parler de ça, allez lire cet article de l'Echo:  
  
http://www.lecho.be/dossier/sdla_pension/L_age_de_la_retraite_des_deputes_n_est_plus_tenable.9760867-7077.art?ckc=1

C'est marrant, hein! C'est parait-il une initiative de Hedebouw, et le premier dont on parle dans l'article, c'est le bien nommé Siegfried Bracke, un des fachos de la NVA. 

Je vous propose un autre exercice; vous allez sur la page Facebook de Raoul, là où y a la vidéo qui le rend si fier, vous faites un copier des commentaires des lecteurs, et vous allez coller sous certains articles du site de Modrikamen ou de la page Facebook de Laurent Louis. Caramba, ça marche! 

Chute des feuilles. Poujadisme de bas étage (non, ce n'est pas un pléonasme, on est vraiment à la cave). Surfer sur la vague antipolitique pour se faire le plein de voix, Raoul, Raoul, tu vaux mieux que ça!

Allez, tu aurais pris comme point d'appui le salaire éhonté de nos représentants politiques, histoire de faire pisser de rire les vrais puissants de ce monde qui du haut de leur nuage doré contemplent amusés des pitreries de schtroumphs... 

Hé, on est d'accord sur beaucoup de trucs, hein, une plus juste égalité salariale, le respect de tous les travailleurs, une taxation plus rude des gains qui ne requièrent aucun travail. Mais à trop surfer, tu passes à côté des vrais requins. 

C'était pas idiot d'aborder la question des pensions à partir du point de vue des parlementaires. Mais quand on veut jouer à la fois les justiciers et les aspirateurs à voix, on loupe l'essentiel.

A l'inverse du commun des mortels, les politiques, la retraite, ça leur fait peur. Plus de photographes, plus de gazettes, plus de feux de la rampe. le vide. L'autre jour, un ami me parlait de Joseph Michel. Non non, Raoul, ce n'est pas encore un frère à caser, c'est une figure historique, le père des fusions de communes. né en 1925. Et il parait qu'il vient seulement de quitter son dernier mandat...

C'est comme ça, les politiques. Quand ça décroche, soit ça déprime, soit ça écrit des mémoires qui finiront noyées sous la poussière de bibliothèques communales mal entretenues, par compression de personnel.

Alors, le vrai problème, tu passes à côté. Ce n'est pas seulement que les politiques sont mal placés pour décider seuls de l'avenir des pensions, un peu comme si des xénophobes devaient gérer la politique d'asile (oups...ça s'appelle un acte manqué).

Le vrai problème, c'est l'étroitesse de perspective de la démarche actuelle. La gestion de la carrière, c'est la gestion de la vie. C'est avoir du temps libre quand les enfants sont petits et pas quand ce sont eux qui ne l'ont plus pour venir vous voir, c'est faire le tour du monde avant d'avoir trop de rhumatismes, c'est aussi accepter que des briques, c'est plus lourd qu'un stylo, et que le stylo, parfois ça lasse et ça donne envie de briques. 

De la perspective! C'est ça qui manque à ces libéraux qui n'ont que des billets de banque dans le cerveau, et en plus, ces crabes, c'est la plupart du temps même pas les leurs!

En attendant, redeviens sympathique, Raoul, retrouve ta vocation première, va avec Petit Jean faire les poches d'Albert Frère, de la famille Bettencourt ou... allez, Bill Gates... Cap ou pas cap?


jeudi 28 avril 2016

Y a trop de bébés dans le siphon (petite variation de l'Etat C'est moi)


Même s'il est hautement compréhensible, le climat actuel de "politiques tous pourris" ou "tous malhonnêtes" ou "tous guidés par l'appât du gain" ou "tous plus préoccupés par leur image médiatique que par l'intérêt général" ou "tous responsables du bordel actuel" a des relents de gangrène.

D'abord parce qu'il constitue potentiellement la justification d'un tas d'excès: puisque les politiques sont pourris, pourquoi tout le monde ne pourrait-il l'être?

Ensuite parce qu'il peut aboutir à la négation même de la démocratie, se convaincre que supprimer la politique pourrait constituer une solution. Alors que les deux seules voies qu'ouvre ce type de non-analyse sont l'anarchie ou la dictature. Vive les rassemblements spontanés qui visent plus de démocratie, ce sont des démarches salutaires, au même titre que d'autres remises en cause incontournables d'un système en asphyxie...mais qui ne sauraient le remplacer. 

Enfin, parce que cette globalisation fait perdre du discernement à doses massives. Ce n'est plus un individu qui pique dans la caisse, c'est presque le système qui l'y a poussé. Et quand un politique formule une bonne idée, c'est sûrement qu'il a une visée électoraliste. 

Or soyons clairs: Bart De Wever et sa clique sont d'authentiques totalitaristes (dans leur idéologie,  il y a l'indépendantisme flamand basé sur l'idée du boulet wallon, c'est pas agréable pour les wallons, mais bon. Mais il y a pire: le dogme fondateur selon lequel sur terre, certains sont faits pour commander et d'autres pour obéir. Quand dans un même parti, il y a à la fois la première catégorie, qui en est consciente, et la seconde, qui ne l'est pas, là, on est chez les fachos. A chacun d'estimer dès lors ce qu'est la NVA).

Mais dans les partis démocratiques, il y a de tout, comme dans la société. Donc des gens qui agissent par conviction. Donc des gens qui, s'ils sont trop soucieux de leur image médiatique, c'est parce qu'ils savent que malheureusement le vote relève souvent plus de l'apparence que des idées. Sont-ils malhonnêtes pour autant? 

Si mon voisin se révèle un escroc, est-ce qu'on va foutre tous les habitants de la rue en taule?

Peut-être que le "Bon usage de la crise", ce sera qu'émergent dans chaque parti démocratique ceux qui sont authentiquement au service de leur vision du monde, parce qu'ils ont de facto un sens de la démocratie qui leur permet la confrontation claire. 

Peut-être aussi qu'on se rendrait collectivement un bon service en apprenant  aux enfants que ce n'est pas la tronche ou le bagout qui fait la valeur d'un individu, et encore moins celle de ses idées. 





vendredi 15 avril 2016

Pas galant pour un sou


On vieillit, quand même.

Il y a peu encore, un goût immodéré et maladif pour l'empathie me pervertissait les émotions, au point de verser une larme face à l'ortie qu'on coupe, l'araignée égarée dans la baignoire qui s'engloutit dans le siphon, ou même l'étron immolé dans le broyeur impitoyable.

Or, aujourd'hui, les crissements métalliques douloureux du bolide super tuné et du bulldozer qui l'accompagne à la casse ne parviennent même pas à m'humecter les yeux.

Mon petit reliquat lacrymal se réserve plus volontiers pour crapauds, lapins et graviers qui eurent un jour la malchance de se trouver sur leur passage.      

mardi 12 avril 2016

Panic room



Dans un immeuble situé sur un célèbre boulevard impérial

- ALERTE ROUGE, je répète, ALERTE ROUGE ! Ordre à toutes les équipes de licencier immédiatement tous les éléments susceptibles d'être contaminés par l'affaire Milquet. Je répète: Ordre à toutes les équipes de licencier immédiatement tous les éléments susceptibles d'être contaminés par l'affaire Milquet.

- Chef, on enclenche la Procédure Renault, ou on attend un peu?

samedi 2 avril 2016

L'Etat, c'est moi


Il y a quelque chose qui commence à me gonfler grave dans le discours ambiant, sans doute parce que ces temps tourmentés le soulignent jusqu'à l'absurde. 
Partout, on lit ou on entend "L' Etat ceci, l'Etat cela, l'Etat a failli, l'Etat ne gère plus, l'Etat périclite, et patati, et patEtat".

L'Etat, c'est nous. Régulièrement, on rougit des cases pour désigner ceux dont on pense qu'ils ont le plus possible les mêmes opinions que nous et qui ont l'air capables de les mettre en pratique.

Le problème, évidemment, c'est que parmi nous, il y a apparemment une majorité de gens qui n'ont pas compris qu'on n'effectue qu'une seule fois son passage sur terre, qu'il faut donc le rentabiliser au maximum et que l'enjeu collectif est là, créer les conditions pour que chacun vive le plus pleinement possible et pas partir du principe qu'on ne peut être riche que si un minimum d'autres sont pauvres, que pour avoir l'illusion d'être libre, il faut se délimiter un espace le plus vaste possible  pour soi tout seul,  que si certaines voies me font peur ou me dérangent, c'est plus pratique pour ma tranquillité qu'on les interdise à tout le monde. Qui ne comprennent pas que viser l'épanouissement pour tous n'est pas incompatible avec le fait de donner mission à certains d' empêcher les fous de nous faire mal, mais qu'éthiquement, on ne peut faire ça que si on essaye de comprendre pourquoi ils sont devenus fous, même si on a quelques petites responsabilités là-dedans.

L'Etat, c'est l'émanation d'une majorité d'entre nous.

Heureusement pour les autres que le cerveau humain soit potentiellement doté d'une imagination sans grande limite. Qu'ils puissent quand même effleurer mentalement le bout du bout de l'horizon.