lundi 17 juin 2019

Un torrent de joie d'ici l'apocalypse


Le langage peut se révéler d'une injustice crasse. Ainsi, plusieurs mots ont été inventés pour traduire l'anxiété liée à la peur de la catastrophe climatique. "Eco-anxiété", somme toute assez banal, d'autant qu'il est le fruit de la climatopsychopathologie. Mais surtout le magnifique "solastalgie", vocable inventé en Australie, peuple qui se révèle véritablement à la pointe en matière de climato-horribilisme. Puisque pas plus tard que la semaine dernière, un groupe de scientifiques australiens prédisait la fin de l'espèce humaine en 2050. En mars ou en novembre? Pour savoir si ça vaut la peine que je garde quelques flacons pour fêter mon 91ème.

C'était ce matin, sur la Première. Pour contrebalancer, sans doute, les coquelicots de mon poète politique favori, voilà qu'on a droit à un couple de dépressifs environnementaux tubiziens. Déjà, habiter Tubize, ça suffirait à justifier quelques mois de congés de maladie par an, mais faut en plus qu'ils lisent des rapports scientifiques australiens! Malheureux!

Quelques conseils dès lors, mes jeunes amis. 

Commencez par une recherche lexicologique. Vous constaterez qu'aucun terme ne correspond au sentiment de culpabilité du dirigeant ou de l'actionnaire de multinationale ultra-polluante depuis des décennies et que "gros con" est encore la seule expression susceptible de qualifier le propriétaire d'une quatre-façades énorme illuminée la nuit, qui possède également un énorme 4X4 pour le transporter avec sa seule épouse qui est maigre comme un clou et trouve marrant d'aller boire l'apéro à Venise, parce qu'à Barcelone, il y a décidément trop de prols. 

Variez vos lectures. Ces derniers temps, il y a eu aussi un rapport sur la fonte anormalement rapide des glaces du  Groenland et un autre sur le Gulf stream qui tourne fou. Mettez-les au chaud (si j'ose dire) pour les vacances et lisez plutôt l'un ou l'autre article sur le transfert d'Eden Hazard et l'émotion sincère de sa maman quand elle en a lu le montant...

Enfin, allez faire un petit tour au cimetière de Marville, c'est un peu au sud d'Orval (bon lieu de thérapie aussi, tiens). Une magnifique nécropole qui compte un "quartier des enfants" anormalement important. Il a dû y avoir une épidémie, je ne ne sais pas de quoi, pour que fourmillent autant de petites pierres tombales. C'est d'une beauté glacée.

Ca vous fera comprendre que regretter que sa progéniture doive mourir un jour, c'est une grande preuve de lucidité. Mais regretter qu'elle soit née... 

J'espère qu'elles n'ont pas la radio dans leur chambre, vos filles.



mercredi 12 juin 2019

Alors, rassurés?

Rien n'est plus déstabilisant qu'une accumulation irrationnelle de perspectives positives. Pour le pessimiste serein (la sérénité constituant bien sûr un objectif inatteignable), c'est même proche de l'insupportable.

Les sondages, par exemple, quand ils sont anormalement encourageants d'une façon désagréablement répétitive, se révèlent de redoutables instruments de torture psychologique. Votre perception de la société humaine est mise à mal, au risque de contaminer cette vision apocalyptique du destin du monde qui vous permet de passer davantage de temps sur les terrasses que dans d'ennuyeuses assemblées militantes.

Fort heureusement, il y a toujours une ou un imbécile (parfois une et un) pour venir ternir le technicolor. S'ils parachèvent leur oeuvre en faisant semblant de rien plutôt que de regagner définitivement les coulisses comme y inviterait la dignité minimale, votre conception de l'humanité pousse un véritable ouf de soulagement...

Ce qui se passe aujourd'hui, bien que participant du même mouvement de retour à la quiétude mentale, n'a pas la même saveur de l'inattendu. Quand le plus doué des tribuns actuels, avant même toute discussion,  te martèle à l'envi la distinction "compromis/compromission", tu comprends directement qu'il va rester dans sa posture habituelle de trublion et qu'un gouvernement de gauche tient du mirage. Vu l'état-major fantôme qu'il a derrière lui, il n'a  sans doute  de toute façon pas le choix, et vu les malins qu'il a en face de lui, difficile que le paravent ne s'envole pas très vite. 

Ce qui est sûr  en tout cas, c'est que les propos de la Secrétaire générale d'Inter Environnement Wallonie, il y a juste une semaine sur la Première, prennent un reflet particulier, même si sur le coup, du café bouillant m'a ravagé la glotte.  

"Ecolo n'a pas le monopole de la transition environnementale". Bizarre. Monopole, non, je n'ai pas souvenir que quiconque ait jamais formulé cette prétention. Mais de toute façon, vu la tournure des événements, il n'y a plus qu'à espérer que votre affirmation se révèle un tant soit peu prophétique, Chère Madame. 

Ceci dit, on ne va pas se mentir : je crains plutôt d'être rassuré...