mardi 21 juin 2016

Bon sang ne saurait mentir (Charlot épisode 10)


21 juin. Il pleut. 

Ce matin, un déséquilibré portant une fausse ceinture d'explosifs a évité à notre brave Charlot d'être la première illustration de son opération "Stop aux mensonges", dont le lancement était programmé sur Bel-RTL.

Affirmer "Stop aux mensonges", dans un contexte politique classique, c'est en effet par définition mensonger. Car le mensonge est une notion étrangère à l'exercice coutumier de la politique.  

Charlot devrait le savoir mieux que quiconque: s'il a affirmé un jour qu'il ne s'allierait jamais à la NVA, ce n'est pas un mensonge, c'est une vérité d'hier qui n'est plus celle d'aujourd'hui. 

La formation d'un gouvernement, dans le système proportionnel, c'est la pilule du lendemain des saillies électorales.

Cette confusion ne date pas d'hier. "L'art du mensonge politique" date de 1733. Et par une amusante mise en abyme, cet ouvrage sous-titré "Le mentir vrai" a été faussement attribué à Jonathan Swift. 

"Le moyen le plus propre et le plus efficace de détruire un mensonge est de lui opposer un autre mensonge". Cette formule serait bien sûr terrifiante si elle correspondait à la réalité. Particulièrement en politique.

Elle impliquerait que la vérité des urnes, qui est intangible en démocratie, repose entre autres sur le mensonge.  

Premier jour de l'été. Il pleut. 








jeudi 9 juin 2016

L'ancistrus dolichopterus et l'eunuque décapité


Expérience très éprouvante, à 7h50 ce 9 juin 2016, à l'écoute de Matin Première : se reconnaître dans des phrases de Rudy Demotte. Et en plus, ce n'est pas la première fois...

Il faut bien concéder à cet homme un don de communication hors du commun. Rudy a un côté "poisson laveur de vitre", il avale les paroles des autres, les digère et voilà qu'elles ressortent comme éclaircies. Ce matin, sur le couplet "régionalisation de l'enseignement et de la culture", ce qu'il a dit était limpide. Diviser un ensemble déjà petit, c'est l'affaiblir. Il n'a pas dit ça comme ça, Rudy fait de la com grand public high class, c'est sa force, il l'a dit plus simplement, via l'illustration. Des profs ou des diplômes différents à Bruxelles et en Wallonie, c'est tellement absurde que ça parle directement.

 Régionaliser l'enseignement et la culture, c'est une idée "eunuque décapité" qui revient tellement régulièrement, au PS comme ailleurs, qu'elle finira bien un jour par se concrétiser. Sans que peut-être tous ses chantres et leurs auditeurs ne se rendent compte eux-mêmes d'une de ses implications ultimes, outre ce côté village de Schtroumphs traversé par un mur de Berlin : la régionalisation de ces deux matières est une idée "after Belgium". Ce n'est pas très original comme analyse. Dissocier Bruxelles et la Wallonie sur leurs fondements francophones, c'est sectionner un des derniers cordons qui tient ce pays uni par défaut. 

"Bruxelles région autonome bilingue", épitaphe en filigrane sur la tombe du pays. Et peu importe le statut institutionnel de ladite région.

Comme Paul M est tout sauf un imbécile, on peut supposer qu'il se place, avec une partie du PS, dans une Wallonie après-belge dominée par son parti...

Et comme on sait aussi que le PS adore les faux débats internes orchestrés par l'arbitre suprême quand il veut pouvoir tout dire et son contraire, il y a de quoi avoir peur pour les francophones de ce pays. Le laveur de vitre l'a dit, ce matin : Elio est au-dessus... Sans doute est-ce lui qu'il faudrait implorer de ne pas commettre l'irréparable... En appeler à sa sagesse... parfois, avec ces gars que leur pouvoir rend fous, ça marche...

Tiens, à propos, l'ancistrus dolichopterus est détesté par les vrais amateurs de poissons d'aquarium. Il est vendu comme laveur de vitre, mais il ne lave rien du tout.  

  

dimanche 5 juin 2016

Sunday beauty sunday

M'avoir fait découvrir le marché de Wazemmes mérite une reconnaissance éternelle jusqu'à ce que ma mort s'ensuive. 

Dimanche brouillardeux de ce côté de la frontière, voilà que le ciel s'éclaire au passage de l'ancienne douane, et que plus l'autoroute nous rapproche de ce quartier de Lille, plus la température fait ouvrir les fenêtres. Il faut se garer loin, tout sent la pisse sur les trottoirs que l'on emprunte, mais quelques odeurs de kebab tempèrent et des mendiantes vous sourient même si vous leur glissez un bonjour plutôt qu'une pièce. 

Wazemmes, c'est le marché du midi... en plus coloré, en plus foisonnant, en plus compact. Il n'y a pas que les marchands qui sont en grande majorité maghrébins, les clients aussi. A Wazemmes, on frôle, on se presse, on bouscule et on est bousculé par des dames voilées qui toujours s'excusent. Les vendeurs de chaussures s'agenouillent devant la petite fille qu'ils appellent "princesse", pour lui enfiler la sandalette magique à 10 €, en souriant parce que vous avez refusé la godasse à paillettes qu'ils proposaient pour choisir un modèle plus sobre. 

A Wazemmes, on achète complice des fruits ou des légumes qui s'encourront tout seuls si on ne les consomme pas sitôt rentrés. Des chemises dont les boutons s'envoleront à la première toux, des piles Duracell reniées par la marque et des économes à 1 € qui rendront l'âme à la première patate. 

Wazemmes, c'est les vacances et le dépaysement à 20 kilomètres, ceux qui ne prennent plus l'avion pour la bonne conscience apprécient.

Après le marché, à cent mètres, il y a un restaurant chinois extraordinaire, La villa de Tsing Tao, sans rire, le meilleur que je connaisse. Le garçon qui accueille rayonne, il est le fils du patron chinois et de sa femme française, il vous repaît des descriptions des plats qu'il déposera devant vous tantôt. 

Le métissage est source de beauté.

Son père, le cuisinier, sourit tout le temps et à la fin du repas, offre à la petite fille un stylo bille aux couleurs de sa robe. Sans doute beaucoup de cuisiniers belges dans des restaurants belges en Chine en font-ils autant. 

Pendant ce temps, sur la place, des familles Roms quémandent quelques légumes et fruits invendus. Les Roms, ce sont un peu des Cheyennes dénaturés par des siècles de regards haineux, ils communient avec les poules des sédentaires en leur tordant le cou. Ils vivent le long de l'autoroute, dans des bidonvilles hallucinants et glauques. Les jupes de leurs femmes pétillent de couleurs. 

C'est tout cela, le marché de Wazemmes.

Vendredi dernier, pendant que Goblet nous distrait, le Gouvernement belge a approuvé la proposition de Théo Francken de supprimer 10 000 places d'accueil pour des demandeurs d'asile.